Robert Clément : « Pandémie et débat au Conseil municipal ».

Citoyen de notre ville, comme beaucoup, je demeure attentif à tout ce qui fait la vie quotidienne de ses habitants. Une vie chamboulée, secouée depuis un an, par un virus qui sème inquiétude, angoisse et parfois la mort d’un(e) ami(e) ou d’un proche. Notre territoire a été particulièrement touché depuis le mois de mars 2020. La crise sociale pèse sur les salarié-e-s, les étudiant-e-s, les retraité-e-s, le monde de la culture, les petites entreprises. Les personnels de santé, les salarié-e-s de la seconde ligne, qui ont tant donné, éprouvent une grande lassitude face à un horizon sanitaire toujours menaçant.

C’est donc tout naturellement que j’ai visionné les débats du dernier Conseil municipal. C’est sur la partie consacrée à la COVID 19, que je souhaite faire part de mon point de vue. Refuser toute polémique politicienne sur un sujet aussi grave peut-il conduire à écarter tout échange, fut-il contradictoire ? Je ne le pense pas, dès lors qu’il est respectueux et posé. La fonction d’un(e) élu(e) local(e) n’est-elle pas de répondre aux inquiétudes de ses concitoyens, à leurs interrogations, de défendre leurs intérêts, et si besoin est, de faire part de leur opinion, parfois critique ?

Lors de ce Conseil municipal, madame Philippin, élue de La République En Marche, a défendu l’idée que le gouvernement avait une stratégie vaccinale, que le département de la Seine-Saint-Denis disposait de 17 centres de vaccinations, que 10 autres, dont celui de Romainville, s’étaient porté volontaires, et que nous avions besoin de solidarité et de patience. Dont acte, c’est parfaitement son droit ! Mais il y a les chiffres annoncés et la réalité !

Faire front ensemble, face à cette pandémie, bien sûr ! Solidarité, évidemment ! Celle-ci s’est d’ailleurs magnifiquement manifestée dans notre ville, grâce aux multiples initiatives des associations, que je tiens, pour ma part, à saluer. Mais en quoi, cela devrait-il conduire à une sorte de consensus, sans qu’il soit possible d’engager le moindre débat contradictoire ? À la solidarité, au nécessaire rassemblement de nos concitoyens pour vaincre le virus, j’y ajoute un autre terme : celui de la transparence ! C’est celle-ci qui me conduit à apporter quelques nuances, le mot est faible, aux propos de Madame la conseillère municipale.

Au-delà du nécessaire respect de tous les gestes barrières, c’est dans le vaccin que réside l’espoir. Nos concitoyens l’ont compris. Alors, ne le tuons pas ! Parler clair, c’est faire le constat que les 17 centres de vaccinations sont, pour l’essentiel, situés dans le Nord et l’Est de notre département. L’hôpital André Grégoire est le seul centre de vaccinations ouvert pour un territoire de 400.000 habitants. Au 21 janvier, 150 professionnels de santé, 85 professionnels libéraux et 31 patients dialysés avaient été vaccinés. La vaccination des personnes de plus de 75 ans a commencé le 23 janvier. Les prochains rendez-vous ne pourront être pris qu’à compter du 17 février. Quant aux 10 centres, dont celui de Romainville, absolument rien ne dit qu’ils pourront ouvrir dans les prochaines semaines. J’ajoute qu’à la date du 27 janvier, le département de la Seine-Saint-Denis était bon dernier pour le nombre de personnes vaccinées (0,9%).

Si l’on se réfère à la phase 1 de la campagne de vaccination décidée par le ministère de la santé et des solidarités. Le chiffre de 100.000 évoqués par Madame la conseillère municipale est bien inférieur à la réalité. Ainsi, c’est plus de 30.000 personnes de notre territoire qui devraient avoir reçu le vaccin, d’ici le début mars (professionnels de santé publique et privée, pompiers aides à domicile, personnes de plus de 50 ans atteintes de comorbidités, personnes en situation de handicap, personnes âgées de plus, de 75 ans…

Comment cela est –il possible compte-tenu du rythme actuel de vaccinations ? À l’évidence, la France et l’Europe gèrent une pénurie de vaccins ! Nommer les choses par leur nom, ce n’est pas intenter un quelconque procès au gouvernement.

C’est un fait, les calendriers de livraisons ne sont pas respectés par les laboratoires. Pendant combien de temps encore, notre pays, comme ceux de l’Union européenne, seront tributaires des décisions des grands laboratoires, pour qui, seuls comptent les profits financiers, qui plus est, réalisés avec l’apport de fonds publics. Il est impératif que la France et l’Union Européenne exigent, de ces groupes, que leurs engagements soient respectés. L’entreprise Sanofi vient d’annoncer dans le cadre d’un accord avec Pfizer le conditionnement de 100 millions de doses pour le mois de juillet. Une décision qui arrive avec retard et très insuffisante. Madame Philippin nous dit que cet accord pourrait permettre la production en France. Non ! Ce sera en Allemagne. La France peut s’appuyer sur l’adoption d’une la résolution du Conseil de l’Europe « appelant à dépasser le système de brevets pour sortir de la pandémie, afin d’assurer la production et la distribution, à grande échelle, de vaccins dans tous les pays et pour tous les citoyens ». Pourquoi pas dans d’autres sites de Sanofi… en France.

La COVID 19 se propage comme un feu de forêt. Les solutions doivent se propager plus rapidement encore. Aucun pays, aucun continent ne sortira de la pandémie au détriment du reste du monde. Au contraire, la seule voie de lutte contre le virus et de sortie de crise serait d’adopter des politiques publiques nouvelles et offensives de coopération et de solidarité internationales, comme l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) en conjure les chefs de gouvernements et d’État depuis longtemps, avant même le déclenchement de la pandémie de COVID 19.

Le 28 janvier, le généticien Axel Kahn, considérant que l’absence de distribution de vaccins aux pays les plus pauvres, « ne permettra pas de faire face à la catastrophe » a lancé un appel solennel à Emmanuel Macron « l’exhortant de lancer une initiative à l’international, peut-être par une convocation du Conseil de sécurité de l’ONU, pour organiser une distribution équitable des vaccins sur l’ensemble de la planète, sans spolier personne. »
Cette sollicitation nous interpelle toutes et tous. Elle nous éloigne des considérations politiciennes, avouées ou non ! Elle exige des réponses claires, un pacte de vérité et de transparence de la part de nos gouvernants. Ici, nous parlons du destin des citoyens du monde !