Les récents propos d’Emmanuel Macron devant les ambassadeurs, affirmant que les Africains devraient « remercier la France » et insinuant que leur souveraineté serait conditionnée à l'intervention de l’armée française, ne sont pas seulement méprisants : ils révèlent une continuité inquiétante avec une tradition néocoloniale profondément enracinée.
Depuis les indépendances, la France a maintenu son influence sur ses anciennes colonies africaines par le biais d’un système que l’on nomme Françafrique. Sous couvert de coopération, cette relation repose sur des pratiques qui perpétuent les rapports de domination hérités de la période coloniale. Le franc CFA, par exemple, a été un outil clé de ce contrôle, permettant à la France de gérer directement la politique monétaire des États africains et de contrôler leurs réserves de change, les réduisant à un rôle de « pourvoyeurs de matières premières ».
En parallèle, des entreprises françaises, comme Bouygues ou Bolloré, ont exploité cette dépendance en établissant des empires économiques sur le continent, souvent en démantelant les services publics locaux, avec le soutien d’institutions comme le FMI et la Banque mondiale. Ce néocolonialisme économique s’est accompagné d’un soutien politique indéfectible à des régimes totalitaires, comme ceux de Bokassa en Centrafrique ou de Mobutu au Zaïre, renforçant ainsi des systèmes oppressifs au détriment des aspirations démocratiques des peuples africains.
La France est également la seule puissance coloniale à avoir maintenu une présence militaire ininterrompue en Afrique depuis 1830. Sous le prétexte de stabilité, ces interventions ont souvent servi ses intérêts stratégiques et économiques plutôt que les besoins des populations locales. Ce mélange d’interventionnisme militaire, d’ingérence politique et d’intrusion économique s’est opéré sans véritable contrôle démocratique en France, ni responsabilité vis-à-vis des conséquences pour les Africains.
Les déclarations de Macron s’inscrivent dans cette logique paternaliste, rappelant le discours de Jules Ferry en 1885, qui justifiait la colonisation par la prétendue supériorité des races.
En 2025, tenir de tels propos est une insulte aux luttes des peuples africains pour leur liberté, et un déni de leurs sacrifices pour conquérir leur souveraineté.
Pourtant, ce mépris ne fait qu'augmenter un ressentiment légitime. Loin de pacifier les relations, il attise le rejet d’une France perçue comme arrogante et néocoloniale. Pour construire des relations respectueuses et justes, la France devrait rompre avec l’idée d’une « mission civilisatrice » et reconnaître pleinement les responsabilités de son passé colonial. Cela implique d’abandonner toute forme de condescendance, d’ingérence et de domination pour établir des partenariats fondés sur l’égalité, le respect des souverainetés et une coopération équitable.