L’horrible meurtre dont a été victime la jeune Philippine âgée de 19 ans a suscité beaucoup d’émoi dans le pays et nos pensées vont d’abord vers sa famille, ses amis, ses proches endeuillés.
Cette jeune fille a été violée et tuée par un homme avide de domination. C’est le 104ème féminicide de l’année dans notre pays.
L’homme présumé coupable est étranger et frappé d’une OQTF (Obligation de quitter le territoire français). Qu’il soit étranger ou non ; qu’il soit en situation régulière ou non sur notre territoire ne change rien à l’affaire ; Philippine est morte sous les coups d’un homme et cet homme est un meurtrier. Même renvoyé dans son pays d’origine il aurait sans nul doute continué à perpétuer d’autres crimes.
Ces dernières années des hommes qui n’étaient pas des étrangers ont abusé, tué des femmes mais aussi des jeunes filles. Ces crimes n’ont pas suscité autant de haine envers leurs auteurs. Faut-il rappeler les crimes de Fourniret, d’Emile Louis, de Guy George pour ne citer que ceux-là… Quant au procès du mari de Gisèle Pélicot, violée par des dizaines d’hommes, il montre comment la culture du viol est imprégnée, voire banalisée dans notre société.
Le RN qui s’est emparé du meurtre de Philippine pour déverser son venin raciste a malheureusement fait des émules dans l’espace médiatique et celui des réseaux sociaux dénaturant les faits.
Certes, le meurtrier, déjà auteur d’un viol et condamné pour ce crime, faisait l’objet d’une OQTF délivrée par l’autorité administrative (le Préfet). Cette mesure n’a pas été exécutée faute de suivi par les autorités compétentes.
Les procédures d’OQTF ont été modifiées à plusieurs reprises par les différents gouvernements. Elles ont toutes le même objectif : restreindre les libertés de celles et ceux qui sont frappés par cette mesure et les empêcher de faire valoir leurs droits dont celui de contester l’OQTF devant le tribunal administratif ou le juge des libertés et de la détention.
La plupart des personnes retenues en centre de rétention administrative (CRA) et possiblement frappées par une OQTF n’ont commis aucun délit, aucun crime ; elles étaient, pour la plupart, dépourvues de papiers leur permettant de rester sur notre territoire.
Sur les milliers d’OQTF prononcées par les préfets, un certain nombre ne sont pas exécutées pour diverses raisons qu’il serait trop long de décliner ici.
Pour y remédier, et à l’instar des gouvernements précédents, le Premier ministre et son ministre de l’Intérieur souhaitent prolonger la rétention dans les CRA de 90 à 180 ou 210 jours pour mieux exécuter les OQTF ; or cet allongement ne règlera rien sauf à priver plus longtemps de liberté les personnes retenues.
Autre idée de ceux qui nous gouvernement : conditionner l’octroi de visas aux personnes en provenance de l’Algérie, du Maroc, du Sénégal, de la Tunisie, du Mali, de la Guinée et de la Côte d’Ivoire à la délivrance par leurs autorités de laisser-passer consulaires pour expulser de notre territoire leurs ressortissants retenus en France. Or, cela n’empêchera pas les personnes qui le souhaitent de passer par d’autres pays, sans avoir besoin de visa, pour arriver dans le nôtre.
Ces annonces, comme celle relative à la suppression de l’AME, satisfont celles et ceux qui se plaisent à faire l’amalgame entre étranger/sécurité/violeur/meurtrier.
Tout ceci pour dire qu’il ne faut pas avoir une vision simpliste de ces sujets qui méritent d’être abordés avec une rigueur politique dans une vision autre que purement sécuritaire et anti-migrants. C’est un débat sérieux qui doit être ouvert sans tabou mais avec responsabilité et il ne faut pas se tromper : celui qui a violé et tué Philippine est un violeur, un meurtrier qui devra être jugé comme tel et non parce qu’il est étranger frappé d’une OQTF.